Nous avons rencontré Tiken Jah Fakoly, artiste engagé et star ivoirienne du reggae, après son concert à la Prairie sur Terres du Son.
Vous avez ajouté une certaine identité à votre musique en utilisant des instruments tels que le soku ou la kora, qui sont très peu utilisés dans le reggae; comment expliquez-vous ce choix?
Vous savez le reggae est né en Jamaïque. Je suis convaincu que l’on ne fera pas le reggae mieux que les Jamaïcains. Mais si les instruments traditionnels africains fonctionnent bien, cela veut dire qu’il y’a un lien avec cette musique et ces instruments. C’est ce que j’ai voulu prouver et ça a bien marché. On a utilisé le soku, la kora, le Kamélé n’goni que vous avez vu sur scène. Pour moi c’était important de donner une couleur Africaine au reggae et les instruments traditionnels ont apporté ça. L’expérience a débuté en 2007, ça a bien fonctionné alors on continue.
Pourquoi avoir enregistré cet album en Côte d’Ivoire? Est-ce un retour aux sources?
Maintenant j’ai les moyens de me construire un studio, j’ai une bibliothèque reggae, deux salles de répétitions et un studio d’enregistrement . Pour nous c’est important d’enregistrer à la maison: d’abord c’est économique, et ensuite on ce sent mieux chez soi. Quand on est à la maison, on peut avoir des vibes que tu n’auras pas si tu fais un voyage de plusieurs heures d’avion pour aller en Jamaïque ou ailleurs. Mon studio est au sous-sol, quand je vais en studio je sors de chez moi et je descends au studio, même à minuit si on a une idée on va pouvoir l’enregistrer. Je pense que Bob Marley avait également un studio à la maison.
Chacun de vos albums est engagé avec une thématique ; pourquoi l’écologie sur votre dernier album ?
C’est simplement parce qu’il y a urgence. Comme je l’ai dit tout à l’heure sur scène, la planète nous parle. Elle nous parle parce qu’elle ne peut pas s’exprimer, et donc elle agit. Normalement au mois de mars il ne doit pas faire aussi chaud, il y a d’autres périodes de l’ année où on dit ce n’est pas normal qu’il fasse aussi froid. La planète est perturbée, et il y a des raisons à ça, c’est que l’on a fait beaucoup de dégâts. Si l’on veut réserver une planète propre pour nos enfants, si l’on veut leur éviter des galères, je pense que c’est bien d’agir. Pour moi c’est très important de participer à cette sensibilisation.
Qu’évoque pour vous un festival comme Terres du Son, qui essaie chaque année de réduire son empreinte écologique ?
C’est très important d’avoir des festivals comme ça, les artistes ont cette capacité là, de faire passer des messages à des milliers de personnes. Chaque personne n’écoute pas la même radio au même moment, ne regarde pas la même télé au même moment, et donc aujourd’hui il y avait beaucoup de monde. Le message que l’on veut faire passer, même si tout le monde n’accepte pas le message, va faire son chemin je pense, des gens vont en prendre conscience. Donc le fait d’avoir un festival comme ça est très important parce que c’est une occasion de rassemblement et donc de faire passer des messages à de nombreuses personnes. Et puis surtout ce qui est important c’est le festival montrant l’exemple, pour le futur. Aujourd’hui on à encore le temps d’agir et il le faut pour nos enfants.
Propos recueillis par Baptiste Guérard (Mission locale Touraine)